dimanche 29 juin 2008

Jehan Sylvius !

Jehan Sylvius. Messes noires (Editions de Lutèce, 1929, couv. de Matutano)

Encore un livre bien mystérieux ! Ce n’est pas sur le net que l’on trouvera des informations en tout cas… Qui est donc Jehan Sylvius ? La question se pose souvent au sujet d’un autre livre dont il est le co-auteur avec Pierre de Ruynes, La Papesse du Diable (réédité par… Eric Losfeld puis par Ombres plus récemment). Pour certains, il s’agit de Robert Desnos, Pierre de Ruynes étant quant à lui Ernest de Gengenbach (ou Genbach). Pour d’autres, Jehan Sylvius serait un poète oublié du nom de Pierre Renaud (cité dans ce livre p.119). Mais le mystère demeure !
Je garde un souvenir très mitigé de La Papesse du Diable. Ce livre-ci, au contraire, m’a beaucoup plus intéressé. Se présentant tout d’abord comme une immersion dans les milieux satanistes et lucifériens sans aucune prise de position (un peu à la Ange Bastiani-Maurice Raphaël dans les milieux interlopes), l’ouvrage vire de bord vers un fatras occultiste où tout se mélange (sabbat, messe noire, envoutement et même vampirisme… le narrateur de ces « choses vues » est même violé par deux succubes), puis vers un texte racoleur décrivant par le menu les pratiques sexuelles de bien étranges rituels, pour finir par un chapitre complètement déjanté voulant prouver au monde que le retour d’Isis* Trismégiste est imminent, très attendu du moins… au point que le narrateur l’implore de toute son âme dans une déclamation incantatoire du plus bel effet. Je crois qu’on entre encore ici dans la folie littéraire la plus pure. Si je devais avancer une hypothèse sur l’identité de l’auteur, je pencherais volontiers pour Gengenbach. Ce dernier est d’ailleurs cité à deux reprises dans le livre, et ses ouvrages sont évoqués comme des références. L’auteur, Desnos, Gengenbach, Pierre Renaud ou qui que ce soit d’autre, possède, quoi qu’il en soit, une connaissance approfondie de l’occultisme (ou de très bons dictionnaires à portée de main). Les citations et les références abondent, littéraires (Huysmans, Rachilde, Verlaine etc.) ou occultes (Pic de la Mirandole, Eliphas Levi, Papus etc.) Le surréalisme fait une courte apparition en la personne d’Aragon, cité pour un article dans la Révolution Surréaliste, ce qui me pousse à penser que Gengenbach n’est pas loin. Quant à Desnos, j’ai tout simplement du mal à l’imaginer derrière tout ça, mais pourquoi pas… Je n’apporterai pas ici la clé d’une énigme qui mérite presque de le rester tant le mystère est inquiétant. Et vive Satan ! Qu’il nous en bouche un coin !

Quelques citations :
« Soudain, Satan s’immobilisa et, retirant lentement son trench-coat, il apparut nu, grandi démesurément sous la pleine lune qui éclairait la scène de blêmes lueurs, le bras gauche levé, l’index tendu, et en tenant de la main droite son phallus dressé, gigantesque et rosé au bout […] Toutes lui baisaient d’abord les pieds et remontant, frôlant de leurs lèvres ses jambes, elles arrivaient jusqu'au sexe. Les unes le baisaient longuement et passionnément, ravies d’extase ; les autres le mettaient tout entier dans leurs bouches (sic) et l’aspirait (re-sic) goulûment » (p.95)

« Nous t’attendons, ô Isis Trismégiste, première Emanée de l’Ineffable Absolu !
En communion spirituelle avec les Initiateurs venus de l’Atlantide pour nous transmettre la Tradition Rouge,
Avec nos Maîtres, les Mages et les Hiérophantes des Sanctuaires de Thèbes, de Memphis et de Babylone,
[…]
Et puissions-nous un jour, par Ta Grâce et Ton Amour, être affranchis de l’esclavage du Démiurge, et réintégrés avec les Eons dans le sein du Divin Plérome. Amen !
FIN. »
(p201-202)


* Vous apprendrez ici, bande de béotiens, que Paris vient du nom de ses habitants Parisis, de Par-Isis, autrement dit les adorateurs d’Isis, puisqu’après les rives du Nil, bien entendu, c’est sur les bords de Seine que vécurent les plus grands adorateurs de cette déesse égyptienne… On ne rit pas, il y a foule de sites qui défendent ces absurdités, et que l’Ile de la Cité avait la même forme que la barque d’Isis et qu’un temple secret dédié à la déesse est caché sous Notre-Dame etc, etc.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

quelle merveilleuse littérature^^

Clifford Brown a dit…

Pfiou, encore un post sévèrement burné ! Et un bouquin de plus à ajouter sur la liste, doit pas être facile à trouver celui-là...

Anonyme a dit…

En voilà un livre qui m'as l'air de bien sentir le souffre, ça semble foutrement intéressant et blasphématoire :)