samedi 28 juin 2008

Entroducing...

Un des grands intérêts de ce gros bouffe temps d'Internet est de rencontrer des gens qui partagent la ou les mêmes passions que vous. Il est temps de faire un peu de pub, donc!

Entroducing :
Un cochon de plus dans mes liens (no offense William if you try to translate, i don't mean you're a pig, "cochon" is more like naughty, interested by hot stuff etc...), bouquiniste à Brooklyn (après Selena Kimball, elle aussi de Brooklyn...) et visiblement passionné par la littérature populaire et les belles couvertures aguicheuses...

La suite ici et sur son blog! Bonne visite bande de pervers...

Entroducing 2:
Un lettré également que ce Will, qui partage avec moi le goût des littératures oubliées (mais moins cochonnes): surréalisme, auteurs méconnus ou trop peu comme Robert Walser, René Daumal...



Allez donc laisser vagabonder vos yeux dans ces contrées!

mercredi 25 juin 2008

Selena Kimball

Le temps de découvrir cette artiste, de la contacter, d'avoir son accord et de faire ce post, une heure... pas plus. Voilà donc une découverte fulgurante!
Selena Kimball est peintre, photographe et collagiste. Elle vit à Brooklyn et expose un peu partout dans le monde. Son travail a fait l'objet de publications... Une petite visite sur son site vous en dira beaucoup plus.
Ses collages ont tout de suite attiré mon oeil par leur affinité avec l'esprit surréaliste, cette inquiétante étrangeté née de la juxtaposition qui me plonge dans une rêverie étrange et agréable. J'espère que vous partagerez mon avis...
Merci Selena!

mardi 24 juin 2008

John Zorn Live


Ca doit bien faire une douzaine d'années que j'écoute John Zorn, les groupes qu'il produit, les groupes qui gravitent autour de lui, et je ne l'avais jamais vu en concert. Si j'avais soudain une rentrée d'argent (plus que) conséquente, je me précipiterais sur tout son catalogue Tzadik. Bref, je crois que, malgré quelques périodes de lassitude et quelques revirements, je peux dire que, j'aime, John, Zorn.
Hier soir fut donc le grand soir, la belle rencontre. L'affiche était assez exceptionnelle à vrai dire. Et encore ce n'est que le premier concert d'une belle série que propose en ce moment la Cité de la Musique. Par manque de thune, je n'aurais vu que celui-là.
Le concert s'est déroulé en trois parties; D'abord Necrophiliac! Le trio Zorn, Fred Frith (infatigable guitariste expérimentant toutes les sonorités et tous les univers accross the border) et Mike Patton (ex Faith No More et désormais vocaliste (?) fou (!) et membre de plusieurs entités assez côtées dont Fantomâs. Dès la première note stridente du saxophone survitaminé de Zorn, ma voisine de droite (qui accompagnait son mari plus qu'elle n'assistait au concert) s'est obstrué les oreilles de deux majeurs pointus qu'elle ne décollera de ces petites cavités proprettes (je l'espère) qu'à la dernière seconde. J'étais ravi. Ma voisine de gauche, qui partage, en plus de ce concert, sa vie avec moi, s'est décidée à "ne pas lutter contre le bruit, à se laisser immerger". Au final je crois que ce boucan l'a bercée... Elle est d'ailleurs capable de se détendre et même de se relaxer en écoutant du Wolf Eyes... chose rare qui fait que je l'aime et que je ça risque de continuer. Fermons-là cet aparté qui n'intéresse strictement que moi...

Bruyant, brutal et beau fut ce jet d'adrénaline juvénile car comme les Sonic Youth qui approchent de la papitude, les musiciens "zorniens" ne cessent d'être jeunes et de transmettre un peu de leur rage d'il y a presque 30 ans. L'adéquation entre eux est également quelque chose de fascinant à observer. Ces gars-là se connaissent sur le bout des ongles. Chaque morceau, calibré et ciselé à la seconde est un défi d'interprétation tant Zorn aime jouer des brusques changements d'univers, de rythme, faisant de la rupture un étonnant moteur d'innovation et de renouvellement. On ne s'ennuie jamais!
La deuxième partie fut consacrée au trio infernal qui n'a plus rien à prouver: Painkiller! A savoir Zorn, Bill Laswell à la basse et le cinglé de batteur Mick Harris (Napalm Death, Scorn...) Ce trio-là aussi forme une entité incroyable. Chaque écart, chaque improvisation est l'occasion d'un exercice ludique entre eux, et ça se sent. Qui poussera qui vers la fausse note, vers le dernier retranchement... La basse dub de Laswell sur le flot tonitruant de la batterie grind core de Mick Harris... Le souffle furieux de Zorn sur un silence aussi profond que bref... Violence, équilibre et splendeur furent les maîtres mots de ce moment d'intensité funambulesque.
Pour finir, l'équipe au complet rejoignit la scène pour un agréable chaos organisé fait de brefs morceaux ultra violents dont le rappel qui fut si bref qu'il provoqua quelques sifflets rageurs, laissant la moitié de la salle perplexe (22 euros quand même, merde) et l'autre ravie. Je me place dans la deuxième catégorie, sans aucun doute. Putain j'ai enfin vu Johnny Zorno!

Quelques photos pas top because j'étais LOIN et que mon Canon a à moitié rendu l'âme depuis quelques mois. Pis c'était pas vraiment autorisé alors j'ai fait ce que j'ai pu. Pour les plus curieux (et les plus masos, une vidéo de 5 minutes toute floue de l'entrée sur scène de Painkiller!)

Et la vidéo c'est par

Osman Walter (G.J. Arnaud) Love Cab. Ed. Euredif, coll. Aphrodite Classique, 1978

On connaît surtout G.J. Arnaud pour sa prolifique production de romans policiers et d’espionnage au Fleuve Noir et pour nombre d’autres éditeurs, ainsi que pour La Compagnie des Glaces, grande fresque de S.F que je n’ai pas lue. Son œuvre érotique et gore reste à découvrir. Penchons nous pour l’instant sur le premier volet. Bien que les érotiques d’Arnaud soient des œuvres de commande, l’auteur a répété dans des interviews qu’il assumait ces textes (bien plus que des romans gore d’ailleurs). On le comprend en lisant ce superbe Love Cab.

Je vais encore une fois parler de TOUT le livre... Pour ceux qui seraient tentés, ne lisez pas ce post en entier. Toutefois, un livre érotique (celui-ci en tout cas ne repose pas essentiellement sur le déroulement d'une intrigue, donc pas de suspense, peu de chance que je vous gâche la lecture cette fois)

L’histoire se déroule à la fin du XIXème siècle à Londres, époque de répression morale assez lamentable. On pense à Oscar Wilde d’ailleurs cité dans le livre à plusieurs reprises.
Lord Thomas Baker se retrouve seul chez lui car sa femme est partie pour plusieurs semaines dans sa famille française. Se rendant à son club (où Conan Doyle est présent), il croise Michael Abboth, « le plus exécrable raseur de la capitale et peut-être même de l’empire ». Ce dernier lui raconte que dans les profondeurs du fog londonien, la nuit, surgit parfois un mystérieux véhicule, le Love Cab. Deux femmes l’occupent, l’une conduit et l’autre prodigue les caresses les plus exquises. Pour 20 guinées, Abboth s’est fait caresser le sexe par une main « fine et délicate, gentiment enduite d’une pommade parfumée à l’œillet ».
Thomas Baker est intrigué autant qu’incrédule. Il devra lui-même se faire une opinion…
Plus tard, il se rend chez Peter Richter, l’un de ses amis, chez qui il lorgne sa sœur Emily et sa demoiselle de compagnie Rita. Peter, plus libéré que Thomas, lui révèle que ces deux-là entretiennent des rapports lesbiens qui défient toute morale. Thomas, offusqué, se souvient alors de ses émois de collégien avec des hommes. Son homosexualité refoulée refait surface quand Thomas Baker se dénude devant lui pour prendre son bain…
Le chapitre 3 nous apprend que Rita et Emily, la sœur de Peter, sont en réalité les deux beautés qui hantent les rues sombres de la capitale à la recherche de clients. Rita, bisexuelle libérée est en révolte contre « la société, la famille, les règles de cette morale victorienne si étroites ». C’est elle qui a initié Emily la lesbienne aux rapports hétérosexuels tarifés, anaux, bucaux et autres…
Abboth, déambulant sans fin dans les rues mal éclairées dans l’espoir de croiser à nouveau le chemin du Love Cab, parvient une nouvelles fois à se faire vider la (les) bourse(s) par les mystérieuses passagères du cab, mais cette fois il emmène avec lui un mouchoir qu’il leur subtilise. Sur celui-ci sont brodées les lettres R et S. Dès lors il n’a plus qu’un objectif, démasquer ces deux prostituées et toucher la récompense promise par de nombreux moralisateurs londoniens.

De son côté, Thomas, invité chez les Richter (H.G. Wells est également de la fête), découvre le nom de famille de Rita et commence à comprendre… Cela ne l’empêche nullement de se mettre au lit avec Rita. G.J. Arnaud s’en donne à cœur joie dans les descriptions pornographiques. Prudes lecteurs passez votre chemin ! « Son plaisir parut drainer autre chose que son sperme et il fut certain que son sang, sa moelle épinière giclaient au bout de son sexe dans le corps de cette fille »… Thomas se rassure en prenant là un plaisir honnête, hétérosexuel. Mais son attirance pour les hommes n’en a pas moins disparu…
Arnaud poursuit par un passage anticlérical savoureux en faisant entrer un clergyman dans le Love Cab. L’homme d’église pensait trouver là un banal taxi mais comprit vite son erreur…
Rita et Emily prennent peur. Etre démasquées les priveraient de leur plaisir secret et de revenus bienvenus. Emily, suivant les enseignements libertins de Rita, prend de plus en plus de plaisir à faire cela, même si à l’origine, elle se prostitue pour défendre la cause socialiste : « Il est juste que la société capitaliste, ces bourgeois fortunés et ces lords méprisants, soient dépouillés en partie de leurs biens. Et c’est lutter contre la religion que de les faire payer pour leurs vices les plus honteux » s’exclame-t-elle ! Arnaud se montre ici le plus abouti des libertins et le plus motivé des libertaires. Il pousse la logique de son propos très loin en proposant une scène homosexuelle très explicite entre Thomas et Peter (p. 130 pour les amateurs) puis en mêlant tous les vices et tous les plaisirs. La fin du livre est une apothéose de subversion puisque les 4 personnages principaux, Thomas, Peter, Emily et Rita (Peter et Emily étant frère et sœur) finissent par déjouer les investigations de Michael Abbott et se retrouvent face à face avec leurs désirs secrets. Inceste, homosexualité, sodomie, un festival de tabous judéo-chrétiens éclate dans les dernières pages. Les quatre lurrons décident même de créer un deuxième Love Cab pour proposer aux londoniens toute la gamme des plaisirs que la morale leur interdit.
J’avoue qu’avant d’avoir lu ce livre j’imaginais mal G.J. Arnaud en chantre et continuateur des libertins du XVIIIème, pourtant…
Je conseille donc vivement à tous les esprits ouverts de compléter leur bibliothèque secrète de ce petit bijou de subversion carabinée !