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mardi 16 décembre 2008

Jean-Louis Brau - 1968 -

Parmi les nombreuses publications de Losfeld, quelques ovnis comme ce Voyage de Beryl Marquees de Jean-Louis Brau, roman-photo réalisé avec la collaboration de Claude Palmer, qui retranscrit un trip hallucinatoire et sexuel bien dans le ton de l'époque.

mercredi 19 mars 2008

Un porno situationniste?

Hurl Barbe. Pompe le mousse. (Ed. La Brigandine, 1982)

Bon. Désolé pour mes lecteurs fins lettrés, adeptes des sobres couvertures Gallimard, là on passe du côté obscur de la fesse. Et ce jeu de mot pathétique n’est pas vain, non non. La Brigandine fut une EXCELLENTE maison d’édition dans les années 1980, tenue (aux dires de Bernard Joubert) par le non moins excellent Henri Veyrier. Vous en doutez ? Voici un aperçu des titres au catalogue : La Loque à terre, Les Mutants de Panurge, Le Feu occulte ou encore Le Belge au bois dormant. Tiens, j’ai perdu 3 lecteurs
Pour ceux qui tiennent le choc, sachez que nombre d’auteurs connus se cachent derrière les pseudos des auteurs du Bébé Noir (première mouture) et de la Brigandine. Enfin « connus », pas cette tronche d’ahuri de Queffelec mais des gens comme Raoul Vaneigem ou Jean-Pierre Bouyxou, des contre-cultureux et des sympatoches libertaires dont j’imagine, beaucoup sont encore à découvrir. Qui est Hurl Barbe alors ? Tout le monde se demande… J’en sais rien. Laurent Chollet mentionne ce titre dans sa bibliographie au gros volume de L’Insurrection situationniste paru chez Dagorno sans dévoiler grand-chose du vrai patronyme… « Alais Barbe (Hurl) »… ? En fouillant on découvre que d’autres livres sont signés du même auteur : Les Celtes Mercenaires (ahah) à la Brigandine ou Alice Crime chez Deleatur en 1979 (polar oulipien paraît-il…) Quoi qu’il en soit, ce cher Hurl a commis une petite perle porno situ avec Pompe le mousse (pour le plaisir je répèterais ce titre à l’infini…)

Qu’en est-il de l’histoire ? Tout commence avec deux sœurs, Alice et Juliette (foule de références car tout est intertextualité dans ce bouquin), pensionnaires pas sages de l’institut Sainte-Marguerite. Les vilaines se font des cochonneries, expérimentent diverses formes du plaisir partagé avant de se faire virer par manque de sous. Commence alors un périple purement surréaliste dans un univers parallèle qui est à la fois celui des années 70 en France, et tout autre chose. Les références abondent, et les meilleures :
« En riant de l’aventure, nous rejoignîmes le dortoir, traversant les corridors, déserts comme un songe bleu de Paul Delvaux »… Si tous les auteurs de porno connaissaient Paul Delvaux, l’attente des trains dans les gares serait moins longue…
Nos deux canailles donc, se retrouvent en liberté et croisent le chemin des agités de mai 1968, et particulièrement qui ? Les situ ! Oh il faut dire qu’ils sont bien cachés derrière les noms opaques de Raoul van Houten (ohoh), Guy Retord (ahah) et Gianfranco Spaghetti (uhuh), à savoir L’Internationale de Sisyphe (eheh). Plutôt que de parler Hegel ou Marx, Alice et Juliette s’adonnent à la liberté sexuelle la plus hétéroclite : lesbianisme, inceste, urologie…

Ah, je n’ai plus de lecteurs, tant pis je continue. Après avoir tué un flic d’un coup de pavé bien sec, elles sont recueillies par un italien, Antonio Vivace, qui tient en son domaine, le château d’Otrante (tiens donc), un harem d’adolescent(e)s. Le récit que fait cet homme charmant de sa vie mouvementée (parricide, proxénétisme, rabatteur pour le Pape) est une merveille de drôlerie rabelaisienne et surréaliste à la fois.
Poursuivant leur périple sexuel et philosophique, les deux excitées finissent par rencontrer des marins (d’où le titre, Pompe le mousse, vous ne l’aurez pas oublié, mon inexistant lecteur de fin d’article, n’est-ce pas) et Minette et Alex. Quant soudain, alors que tout voguait au poil dans le sous-marin:
« - Je ne comprends pas, tout est en ordre, mais nous perdons régulièrement de la vitesse. Je vais jeter un coup d’œil sur la réserve d’uranium.
Il revint, l’air effaré.
- La réserve est à sec ! On a volé le combustible !
Antonio, perplexe, tirailla la moustache d’Alex.
- Il faut faire une enquête ! Tout le monde à poil !
Comme nous étions déjà nus, ce fut vite fait. Antonio nous flaira comme un chien policier à la recherche de drogues ou de publications subversives.
Arrivé près de Minette, il lui écarta les jambes et ayant fourré son apendice nasal dans son beau derrière, s’exclama :
- Ca sent le 238 par ici !
Minette rougit et trembla légèrement. Antonio lui glissa un doigt dans l’anus et en retira une petite tringle qui scintilla chichement sous les néons.
- Voilà la coupable !
- Ca fait longtemps que tu te shootes à l’uranium ? lui demandais-je, intriguée.
- J’ai commencé il y'a cinq ans. Je faisais le ménage dans une centrale nucléaire »
…. ETC. Ok je m’arrête. Vous ne saurez rien de la suite, de la quête de Somebody endormi depuis 100 ans dans le Botulus et qui se découvre au réveil une gaule d’enfer centenaire, de leur arrivée en compagnie de Théière de Jardin (si !) sur l’île de Tamoé où règne une société sans hiérarchie mais où les Méleffes (activistes féminines en trois lettres, tic tac tic tac…) finissent par violer les hommes et les tuer… Vous ne saurez rien de tout ça parce que vous n’êtes sûrement déjà plus là… Lâcheurs!

dimanche 13 janvier 2008

Jean-Louis Brau. Les Mauvais Lieux de Londres


Ah la fin des années 1960. Une période bénie pour l’édition !

Ce livre appartient à une série publiée par Balland sur les « mauvais lieux ». On trouve dans la même « collection », des ouvrages d’Ange Bastiani et de Xavier Domingo consacrés à la Côte d’Azur et à Barcelone.
Voici donc un texte écrit par Jean-Louis Brau (1930-1985), lettriste puis situationniste, agitateur 68ard et grand curieux.
A quoi vous attendez-vous en voyant la bobine de ce bouquin ? A une énumération de cochonneries pure et simple, un livre mal écrit et racoleur? Ce serait oublier que ce livre s’inscrit dans une époque bien précise. Voilà comment ça commence :

« Si nous reconnaissons, après Althusser, que le concept d’histoire n’est pas plus historique que n’est sucré le concept de sucre, nous pouvons admettre que le concept de mauvais lieu n’est pas localisé ».

Moi déjà, j’aime bien. Et ce n’est pas fini, suivront des citations d’Engels ou de Marx, donnant un air complètement dépassé au propos mais faisant aussi tout son charme.
Surtout, Brau est un type brillant et ça se sent tout au long du livre. Il nous fait visiter Londres avec la passion et l’enthousiasme d’un connaisseur lettré et destroy.
Boîtes de strip, maisons de passe de Soho, prostituées spécialisées dans le sado-masochisme, arrière-boutiques où l’on vend de la pornographie (hautement réprimée dans la pudibonde Albion), tournages de films, mais aussi clochards de l’East-End ou buveurs d’éther. « La buveuse d’éther se reconnaît à sa lèvre supérieure légèrement couperosée. » etc.
Une galerie de portraits de la misère sous toutes ses formes, financière, sexuelle et psychologique.
« Tout ça n’est pas beau. Je préfère encore les voyous » écrit Brau.
Il y a aussi les hippies sous acide qui écoutent du Soft Machine, les « tombales », les prostituées de cimetières et bien d’autres que je passe sous silence pour ne pas gâcher votre plaisir de lecture si vous dégotez ce livre dans un dépôt-vente ou ailleurs.
En effet ce livre n’est plus réédité depuis des lustres et ne le sera sûrement plus jamais…tout se perd !

Ed. Balland, 1969.