Jean Vergerie (le bien nommé) est connu des amateurs de romans
de flagellation qui ont fleuri par milliers dans les années 10 et 20 à
l'enseigne des Orties Blanches chez Jean Fort et de bien d'autres maisons
d'édition spécialisées dans ces fantasmes déjà courants à l'époque. Vergerie perpétue
ce travail la décennie suivante dans la
collection de l' Eglantine entre 1935 et 1938.
L'histoire de Priska est un reprint tardif (publié vers 1955
de façon clandestine par Eric Losfeld aux éditions de l'Hippogriffe) de L'enfer des Voluptés paru en 1937.
Attention, le texte qui suit est un pur spoiler ! Que ceux
qui pensent pouvoir dégotter ce livre et s'en délecter ne lisent que les premières
lignes !
Attention bis, ce livre est, parmi tous ceux que j'ai pu
lire, probablement le plus violent, le plus fou, le plus répugnant dans la
description de sévices en tous genres que si vous venez de déguster une platée de petits
macarons Ladurée (ou Leader Price), je vous conseille de quitter cette page au
plus vite avant se salir votre chemise ou votre robe !
Chapitre 1 !
Chapitre 1 !
Dès son entrée dans le roman, le lecteur plonge dans les environs
de Deauville, terre de vice et dans laquelle les mondanités riment en secret
avec les pires lubricités.
Ainsi, le héros, Raphaël Fewal, lors d'un dîner mondain,
s'éprend d'une belle inconnue qui lui réserve bien des surprises... Pensant la
gent féminine à ses pieds, il se retrouve à lécher, sous la menace du fouet, ceux de la belle Priska, mystérieuse et
inaccessible dominatrice aux ressources sadiques inépuisables!
Chose étrange au passage, notre sexy dominatrix à la peau
brune dit venir de Poldavie, ce pays imaginaire créé lors d'un canular en 1926
par un membre de l'Action Française de Charles Maurras, Alain Mellet, pour
déstabiliser la gauche.
Raphaël donc, en bon machiste sûr de lui, se retrouve
enchaîné chez la belle Priska, soumis et obéissant, bien malgré lui. Madame
Satan s'exclame : "Ah! Je savais bien que tu finirais par accepter. Quand
je pense que tu voulais coucher avec moi alors que tu es juste bon à lécher mon
derrière." Et il le lèchera son derrière, bien forcé, car la belle
s'assied sur lui à la manière des femmes de Namio Harukawa, enfouissant la tête
de l'esclave au plus profond de son anatomie...
"Le hurlement de souffrance de l'esclave est étouffé par les fesses nues de Priska, qui lui écrasent la bouche tellement elle est assise lourdement" (p.25)
L'humiliation ne s'arrête pas là car notre Raph se lamente
encore en encore, contraint à ne jouer que le rôle du spectateur des ébats de
Priska et de son amant Noir, le grand et fort Freddie, qui lui, fait ce qu'il
veut de la perverse Poldave. Armé d'un fouet vif, il fait lui aussi subir à
Raphaël les pires souffrances...
Puis, enfermé dans une pièce sombre, lié aux poignets et aux
chevilles, Raphaël attend sa maîtresse. Celle-ci lui demande de faire sa
toilette, après quoi, elle l'humilie à
nouveau.
"- Je te plais, esclave? interroge-t-elle.
-Oh! oui, maîtresse... vous êtes belle!
Alors, sans un mot, Priska s'accroupit jusqu'à hauteur de
son esclave. Et, souriante, lui crache en pleine figure puis lui applique une
rude paire de gifles.
-Dis moi merci, maintenant! ordonne-t-elle."
Bien évidemment, Raphaël finit par éprouver une certaine
volupté à ce traitement légèrement corsé, et son désir n'en est que décuplé. Il
est donc aux anges le jour où Priska ne voit pas venir l'amant qui était censé
lui procurer son plaisir quotidien. N'ayant que Raph sous la main, c'est lui
qu'elle invite à prendre possession de son corps. L'esclave exulte ! Toutefois,
c'est elle qui monte sur lui, il ne faut pas trop en demander tout de même...
Une fois rassasiée, Priska s'accroupit au dessus de lui et "le souille
honteusement de son intime besoin"... Alors, heureux?
Cette chance qu'à eu Raph de pouvoir pénétrer sa maîtresse
ne va cependant pas sans une compensation, vous l'aurez deviné (le roman
sadique ne fait pas dans la demi-mesure...) Raphaël promet à Priska de lui
offrir son neveu et sa nièce en conduisant sa pauvre tante dans un traquenard,
fournissant ainsi à la bourrelle deux nouveaux et jeunes esclaves. Fin du
chapitre 1, et déjà bien des émotions !!
Chapitre 2!
Chapitre 2!
C'est à Paris, capitale du vice, que se poursuit l'aventure.
Priska emmène son esclave dans une réunion très spéciale... Quatre convives,
connues dans la place de Paris comme le groupe des "Cravacheuses", se
joignent à Priska dans une partie fine du meilleur goût. L'une d'entre elles,
Wanda, porte autour de la taille un double gode qui ne fait qu'exacerber les
sens des délicieuses perverses. Raph, quant à lui, prend quelques coups de
cravache par ci par là, car le rôle de spectateur ne suffit jamais à un bon
esclave...
On fait alors entrer le jeune Roger, neveu de Raph, qui ne
sait pas encore qu'il est un homme. En quelques minutes, Priska et ses Wamps se
chargent d'apprendre la vie au jeune homme, à la dure comme il se doit. Fouetté
et éveillé au désir par la bouche de Priska, Roger sera désormais en la
possession de la sadique, qui l'emmènera bientôt en Poldavie! Cruelle !
C'est ensuite au tour de la jeune Paulette, sœur de Roger,
que s'applique l'humiliation des femmes en furie. Paulette se voit attribuer un
lavement (gros fantasme de l'époque) duquel elle se souviendra longtemps, alors
que sa mère, restée seule et terrifiée, ne sera pas mieux traitée, quelques
instants plus tard...
Les femmes se retirent alors : "Mes chéries, allons
nous aimer un peu après tant d'émotion". Tu m'étonnes. Et Raphaël de les
suivre de force, homme chien soumis et obéissant.
Chapitre 3!
Le lendemain, la mère des deux nouveaux esclaves, que Priska
avait chargé de laver son linge, voit arriver l'heure de sa correction. Irma,
de son petit nom, se voit appliquer sur le visage un pantalon souillé par
Priska, avant d'être fouettée en pleine face... Je vous avais prévenu, ce livre
n'est pas pour les chochottes... et ce n'est vraiment que le début !!!
Se succèdent alors de nombreux sévices sadiens, Paulette
pénétrée par les godes en cuir de Priska, Raphaël forcé de lui lécher la
croupe, Irma attachée à des anneaux scellés aux murs et pénétrée par derrière
avec un fer à friser brûlant, puis empalée sur un vélocipède dont la selle est
un énorme phallus de cuir verni et le guidon une poire d'angoisse, les seins
maltraités par des tenailles tenues par Prisca, et forcée de pédaler alors
qu'elle est au bord de l'évanouissement et de la mort.
On pense aux dessins sophistiqués et tordus d'Eneg (Gene Bilbrew), à cette inventivité dans les mises en scène de torture... La scène se termine en véritable massacre, poussant ce roman aux limites du supportable...
On pense aux dessins sophistiqués et tordus d'Eneg (Gene Bilbrew), à cette inventivité dans les mises en scène de torture... La scène se termine en véritable massacre, poussant ce roman aux limites du supportable...
Chapitre 4 ! (combien de sadiques êtes-vous à lire encore
ces lignes?)
Nous voici, enfin, en Poldavie ! Un peu d'exotisme oriental
pour raffiner les plaisirs. Le cadre est posé : La propriété de Priska,
"L'école des tourments" (ça promet) est située dans un ancien cratère
de volcan éteint, et malgré ses nombreux étages, est entièrement souterraine ! Gardée par des cerbères humains et eunuques
bien sûr, "c'est un véritable cercueil pour tous ceux qui y sont enfermés"...
On imagine...
Des centaines d'élèves de tous âges y sont éduqués à la
rude, et l'on y forme de parfaits esclaves pour les riches sadiques du monde
entier. Prête à satisfaire le maximum de fantasmes, l'école va jusqu'à former
des monstres, qui kidnappés dès leur plus jeune enfance, se voient transformés
chirurgicalement en objets sexuels. Filles à la taille de guêpe, nains, géants,
Vénus callipyges, femmes à barbes, filles de 15 ans aux seins énormes, monstres
à grosses têtes et petits corps, garçons "féminisés", tout l'éventail
des malformations provoquées ou non y est entretenu comme un trésor maléfique
mais lucratif ! Ca vous fait rêver?
Chapitre 5 !
Se prépare l'orgie du siècle à L'Ecole des tourments. Sont
conviés Ivanof, le régent de Poldavie, et Nubar, le responsable de l'ordre.
Deux esclaves leur sont offertes. Attachés par les poignées et fouettées, la
première à pousser un cri sera tuée, l'autre violée...
L'heure de la torture venue, on apporte une machine aux cent
pointes aiguilles qui, une fois électrifiées et plantées dans le corps de la
malheureuse déjà ensanglanté, ne lui laissent aucune chance de survie, d'autant
plus qu'elle est aspergée d'eau bouillante et qu'on lui casse les bras (je
continue?), qu'on lui crève les yeux, et
qu'on finit presque par la dépecer... Je vous passe quelques détails (dites moi
merci)
Ivanof, régent de cette terre de perversions, a promis à
Priska de faire fermer "Le Couvent des Angoisses" qui lui fait une
trop forte concurrence. En échange de quoi Priska lui accorde une nuit d'amour,
entourée de son esclave chien Raphaël et de Paulette.
Or, en 1937, une insurrection commanditée par les bandits
internationaux aux mains du Couvent des Angoisse sème le trouble dans le pays
alors que la Légion Verte, véritable police politique, se rend au Couvent pour
massacrer tout le monde et capture la responsable des lieux, la señorita Moron.
Pire que tous les personnages précédents, si c'est possible, cette charmante espagnole, se sachant perdue d'avance, ordonne à tous ses sbires de se faire plaisir en disposant des femmes du quartier des vierges. Vergerie s'en donne une fois de plus à cœur joie dans les descriptions de tortures. Pour être gentil, je ne citerai que cette phrase qui fera brûler votre imagination : "C'était lugubre et néronesque. Il flottait une odeur de sang et de viol"...
Pire que tous les personnages précédents, si c'est possible, cette charmante espagnole, se sachant perdue d'avance, ordonne à tous ses sbires de se faire plaisir en disposant des femmes du quartier des vierges. Vergerie s'en donne une fois de plus à cœur joie dans les descriptions de tortures. Pour être gentil, je ne citerai que cette phrase qui fera brûler votre imagination : "C'était lugubre et néronesque. Il flottait une odeur de sang et de viol"...
Ivanof capture la señorita Moron et, oh surprise, la
viole... après quelques tortures bien sûr, qui la privent de nez, d'oreilles, de dents, puis elle est livrée au
rats, emmurée, sympa.
"Et le Couvent des Angoisses n'était plus qu'un amas de
décombres et de morceaux de cadavres, d'où l'on pouvait humer l'odeur de la
poudre, de la poussière, de la chair calcinée et du sang. Les oiseaux de proie
autour des amas fumants attendaient le moment d'intervenir"
Chapitre 6 !
Priska se fait lécher par son homme toutou puis s'en
désintéresse d'un coup de pied dans la tête, avant de demander à la petite
Paulette ce qu'elle lit. L'occasion pour Jean Vergerie de se faire un peu
d'auto-promo, puisque la jeune fille lit "Férocités sensuelles", un
livre de l'auteur donc. "une véritable pétarade de viols, de supplices
effrayants, de lavements, de fesses cinglées". Bonne description de
l'univers vergérien.
"- Tu as le choix, dit elle. Tortures et lubricités, le
Couvent des tortures, Goules et Wampires, La clinique des cauchemars... Rien de
plus sadique n'a jamais été écrit." True !
Notre joyeuse équipe de bourreaux et d'esclaves se rend à la
salle des tortures, la fin du livre approche, on s'attend donc au pire. Ils se
font la main sur une esclave, Maggie, attachée par les pieds à une poutrelle,
jusqu'à ce que "le sang dégoutte du corps de la malheureuse, tachant le
sol de plaques rouges". Suit le supplice du pal, particulièrement gore,
durant lequel le Régent arrache les joues de la malheureuse avec une tenaille,
pendant qu'un feu est allumé à ses pieds, la gagnant peu à peu tandis qu'elle
s'enfonce de plus en plus sur le pal. Une fin de scène pour vous donner une
idée du style de ce fou de Vergerie? "Alors la tête de la martyre
s'inclina. Bientôt il n'y eut plus - vision dantesque et luciférienne - qu'un
squelette aux lambeaux de chair brûlés et noircis chevauchant une chaise à
clous"...
Chapitre 7!
Le Régent, ne l'oublions pas, attend sa récompense d'avoir exécuté
l'ordre de Priska. Il ordonne à Priska de lui procurer ce plaisir auquel il
tient tant, une simple fellation ! Or, Priska lui refuse cette pratique tout
juste bonne pour de vulgaires prostituées... Le Régent, fou de rage, attaque la
bourrelle récalcitrante à la cravache, de telle sorte qu'elle finit par céder.
Mais la folie sadique qui s'empare alors de lui ne va qu'en s'aggravant, il lui
casse une par une les dents, transformant sa bouche en un trou sanglant.
Soucieux d'aller jusqu'au bout et d'éliminer cette fabricante d'esclaves pour
prendre sa place, il lui réserve le pire des supplices, "La Vierge de la
Mort". Avant cela, il s'assure que Priska n'ait plus d'oreilles ni de
langue, mais passons...
"Peut-on imaginer salle de supplice plus sinistre? Côte
à côte contre les murs, des mannequins de cire aux visages encagoulés tiennent
des gros cierges électriques. Mais si le regard s'abaisse quelque peu on
remarque que tous ces figurants de musée Grévin, ont le pantalon entr'ouvert et
que des virilités de cire témoignent par leur obscénité quelque signification
lubrique". Au centre de la pièce, l'objet du supplice, une
"monstrueuse statue" ! Une vierge de fer sophistiquée, dans laquelle on jette la trop gourmande Priska. Des centaines de
pointes métalliques lui transpercent le corps tandis qu'elle est pénétrée par
deux sexes métalliques, et vite transformée en "bouillie d'os, de chair et
de sang". Le Régent actionne alors un bouton qui ouvre la vierge de fer,
et continue de se faire satisfaire par la docile Paulette, "au milieu des
pires abjections".
Ouffffffff, voilà. la morale est sauve non, la méchante
meurt à la fin. Le seul problème étant qu'elle meurt pour laisser place à
bien pire qu'elle. Non, il n'y a définitivement aucun espoir pour personne dans
ce livre de Jean Vergerie que le grand Christophe Bier me dit considérer comme
un réel fou littéraire, et je suis bien d'accord avec lui. A la lecture de ce texte,
on est curieux d'en connaître plus sur cet auteur qui ne recule devant rien,
absolument RIEN ! Etait-il lui même un adepte de pratiques sado-masochistes? On
a du mal à imaginer un tel type se forcer à écrire ces atrocités tant il semble
parfois s'emporter dans les descriptions, lâcher le bon sens au point parfois
de se perdre, de mettre ses personnages dans des positions techniquement
irréalisables (lécher les seins d'une femme sur votre dos alors que vous êtes
face à terre?), et porter l'intrigue de façon redoutable vers un climax de
perversion inouï ! Je connais peu d'exemples depuis Sade à avoir décrit de
façon aussi poussée la torture sous toutes ses formes avec cet élan, cette
plume vive qui écrase la morale sur son passage. Bref, faites comme vous
pouvez, mais lisez Jean Vergerie !
J'ajouterai, mon cher losfeld, que vous n'êtes pas le tout premier à avoir rendu un tel hommage à Vergerie. Il eut même les honneurs de la vénérable NRF, qui reproduisit dans son n°101 du 1er mai 1961 un large extrait du roman que vous commentez. Paulhan, Arland ou Aury, lequel, laquelle fut donc autant fasciné(e) que nous pour le publier? Dans la littérature flagellante, il est bien un cas très extrême, mais suivi de peu par J. Van Styk, mystérieux pseudonyme des éditions du Couvre-Feu, lui aussi auteur de textes saignants. Dans un Vergerie, je ne sais plus lequel, il y a un feu d'artifice final avec explosions d'esclaves attachés entre elles et explosant dans les airs!!! Boum. Vergerie ne fut jamais dans la demi-mesure.
RépondreSupprimerTrès intrigué par ce Van Styk Boum ! Merci pour toutes ces informations Christophe !
RépondreSupprimerD'où vient la première illustration (la fille à la cigarette) ?
RépondreSupprimerNamio Harukawa
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